29/11/2005

La vie est un long match tranquille...











La brume enrobait la ville d'une aura poisseuse où l'aube timide, à pas feutrés sur les cendres mourantes de la nuit, se frayait douloureusement un chemin vers la clarté.
D'un miaulement insipide un chat vomit la rue au jour naissant, triste décor d’une genèse aux murs crevassés dans lesquels cherchaient refuge les rêves retardataires que la nuit, en mère indigne, avait laissé traîner derrière elle.
Au bout de la rue, sur le mur, qui connaissait tout du songe des hommes, s'accrochèrent quelques lambeaux de ces rêves du matin, humides....

Un œil qui s'ouvre...

La main qui se balade, machinale, matinale, gratteuse et chercheuse, jusque dans le calebar pour s'imprégner et m'imprégner d'une mâle certitude, rassurante, rassérénante ....

Horreur!

Elle s'arrête pétrifiée...engluée dans l'engeance d'un rêve putride

Je me souviens...


Bonheur!

Elle était belle...une elfe...une houri... me désirant des feux de l'enfer.

J'étais apollon, labourant la nymphe eccho pour devenir, en râles et en cris, l'écho de toute chose...
Tantôt Bacchus possédant l'innocente bergère, jouant de mon pipeau en lames brûlantes jusque dans son âme...jusque dans ses larmes...
tantôt, un prince démon déchu dans les jardins suspendus de Babylone où sans vergogne je goûtais aux plaisirs défendus...
Endossais, l'instant d'un coup de reins, la feuille de vigne d'Adam dans les jardins d'éden pour croquer, jusqu'à la trogne, l'Eve...pauvre pomme...
Pour finir en Salomon, taillant son crayon dans la mine humide de la reine de Saba...une locomotive endiablée creusant son propre tunnel dans la chair...


Extase et pâmoison !

Un train siffleur...

Et le train sifflera trois fois...tata tatoum...tata tatoum....

Encore un coup de sifflet...puis un autre

L'œil qui se rouvre

Un sifflement long...



Conscience!

"merde!"

je tombe de mon "quatri", cours vers la fenêtre...


- " Mais qu'est-ce tu fous Lambdaoui??? On a un match à gagner bordel"

Au bas de ce qui me sert d'immeuble, Momo et Abdel, mains sur les hanches, en rogne et en short d'où s'échappaient deux jambes maigres...on aurait dit deux criquets pèlerins...Nehru et Ghandi prêt à traverser le Gange qui coulait dans le caniveau charriant tant de rêves morts.

Eve et ses copines avaient fondu dans les draps qui ne conservaient de leur passage que quelques tâches impures...ma mère qui va encore pousser sa gueulante....

Coup de sifflet...


Action!

Plus d'une heure que nous montions à l'assaut des buts adverses, sans résultat. Ceux d'en face non plus n'arrivaient pas à concrétiser, pourtant ça n'était pas là l'essentiel. gonflés, nous l'étions... à bloc...le ballon aussi...les soutien gorges de karima qui nous regarde de sa fenêtre se passaient quant à eux de tout commentaire...
Le temps d'un match, nous avions un but. L'instant d'une rencontre nous étions maîtres de nos dérisoires destinées, pantins puérils courant après nos chimères qui se terraient dans ce putain de ballon. Nous étions libres, ingénieux et géniaux, et la rue nous entendait le crier et le suer...le puer...de tous ces relents de rêves pourris.

Coups sourds et halètements s'entremêlaient l'instant d'un combat contre le rien de notre quotidien

Han!...boutt

Boutt....han!

Le temps passe... s'en va faire un tour et repasse. Nous sommes toujours là à dégueuler nos poumons en crachats de nicotine, hurlant le néant de nos avenirs incertains...au grand dam de moui Aïcha qui de sa terrasse nous traitait de vauriens

"fais chier celle là"!! Me halète Abdel le temps d'une remise en jeu..."tu sais que cette salope m'a peloté les chocottes dans les escaliers...fais voir ton beau short qu'elle m'a dit...

il dodelinait de la tête en battant des cils...

- awahhh! C'est paaas vrai !

- ouallah!

Le ballon passe dans notre rayon d'action...aucun pied, aucune tête ne se tend à sa rencontre...moui Aïcha avait tout pris

Nos ancêtres en prennent pour leur matricule de la part des copains...ombrageux...un orage d'insultes...


Fierté!

"Je vais vous montrer bande de ploucs" marmonnais-je dans la barbe que je n'avais pas...

Je cours comme un forcené derrière une boule de cuir insaisissable, en sueur, harangué par la voix stridente d'Abdel à ma gauche...

- "lâche ta balle bordel!...lâche ta balle!"

Momo, en nage et en rage, gesticule comme un pantin désarticulé à ma droite en appel de balle

Je feinte une ombre adverse ...un détraqueur tout crampons dehors se pointe position 2 heures...un petit pont, un saut de cabri...il se gaufre le gros Saïd qui me talonne en arrière garde


Choc!

- "yan3al zabbor ammok! "....témoignage affectif très commun dans nos matchs ....

je passe...Saïd aussi...tata tatoum....

- "rred llor...rred llor"...derrièra-t-il

talonnade...j'évite de justesse deux jambes faucheuses et je fonce...le ballon me revient


éclaircie !

j'aperçois entre les ombres haletantes les bois adverses, deux gros blocs de granit...

j'arme...

"boutt!!"

silence!

le ballon tournoie et s'élève lentement, alourdi par tous les regards chargés de peur et d'espoir...de l'eau lourde qui atomise le temps suspendu aux souffles retenus...

ralenti.!

Momo... grandiose et merveilleux Momo...toutes voiles dehors , exocet de notre petite armada, vole tel un de ces fameux conquistadores de José maria de Hérédia

Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal
Fatigués de porter leurs misères hautaines
De Palos, de Moguer, routiers et capitaines
Partaient, ivres d'un rêve héroïque et brutal...

Vole Momo....vole!... petit oiseau libre et libère nous l'instant d'une victoire de nos misères hautaines...vole mon petit capitaine vole!


Rencontre!

Où une tête et un ballon nous rejouent dans la voûte du ciel de la rue cette fameuse scène immortalisée par Michel Ange sur le plafond de la basilique saint pierre...Dieu et Adam se touchant du bout du doigt dans un rencontre du troisième type...ils n'étaient pourtant que deux...on n’a jamais retrouvé le troisième type…

Un ploc !..

Le ballon est dévié vers les buts, cogne le granit droit et s'en revient vers le milieu...

Je fonce de vers la droite...abdel de vers la gauche

Les pieds se tendent...presque en même temps...je touche la balle en premier...abdel, de sa monstrueuse godasse cramponnée à un pied démesuré, touche mon pied en second....

Buuuuuuuuuut!.....un délire de cris qui étouffe le craquement de ma cheville et mon cri

Ils allaient conquérir le fabuleux métal
Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines,
Et les vents alizés inclinaient leurs antennes
Aux bords mystérieux du monde Occidental
.
le ballon tombe

momo en fin de volée qui retombe

je tombe...contre le mur où mes lambeaux de rêves viennent se mêler à ceux qui s'y cachent pour y tisser l'instant d'un évanouissement la toile de ce merveilleux rêve qui nous lie...le mur et moi

Chaque soir, espérant des lendemains épiques,
L'azur phosphorescent de la mer des Tropiques
Enchantait leur sommeil d'un mirage doré

Pin pon pin pon!

Un couloir d'hôpital... étendu sur un brancard je compte les ampoules qui défilent...un buste qui se penche, galbé et beau, au bout duquel trône un jolis minois

vous êtes??

-"leïla...l'infirmière de garde"...et le début d'une épique histoire que je vous raconterais une autre fois

- "ben ça va...il garde ses rélexes" je reconnais la voix d'abdel...il s'approche et me souffle à l'oreille en même temps que la fumée de sa clope


- "t'as assuré mon grand…t'as assuré...on a gagné"

- « toi aussi t'as assuré enfoiré... tu ne m'as pas raté!...files moi une taffe »

leila réprimande...douce leila…je bande…


Sérénité!

Des blouses blanches...un picotement au bras...et le train siffleur qui revient bourré de rêves...Junon, Eccho, la reine de Saba, Eve...et Leïla...en première classe…Ghandi et Nehru m’accompagnent vers le nirvana…

Ou penchés à l'avant des blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l'Océan des étoiles nouvelles...


Il n'y a pas de lézard...il n'y a pas de lézard...et ne vas encore tâcher l'ésar me fait moman...


Le train s’engouffre dans un tunnel.

La vie est un long match tranquille....





© lambdaoui

22/11/2005

Les anémones géantes












De ses doigts feutrés, La brume qui charriait le parfum de la mer jusqu'au seuil de nos portes, déposait, en souvenirs, de petites perles sur les cheveux des rares passants. Le vent, enroué, se gargarisait d'une infusion d'algues qu'il s'amusait à venir nous recracher à la figure

Un dimanche casablancais comme tant d’autres...

Couleur?...gris potiron...je sais... ça n'existe pas, mais imaginez bordel!!!

« On dirait que la mer a roté » me dit Momo tout en lissant ses cheveux..

les perles se désagrègent en traînées de ciel nuageux sur le col de son veston.

Dans la grisaille matinale nous étions des anémones collés aux rocher du bout de la rue…

Oui…des anémones…géantes…

Momo, se mit à onduler au gré du vent, les bras écartés, en faisant des houuuu houuuu

- « pourquoi tu fais houuu houuu?? »


- « ben je fais l'anémone!!! » qu'il me répond



n'importe quoi...

je lui explique qu'une anémone ça ne fait pas houuu houuu, qu'une anémone c'est un petit animal marin appartenant à la famille des cnidaires, possédant un pied qui s'attache au rocher ou s'ancre dans le sable ...et que c'était l'habitat préféré des poissons clowns...

bref! Ça n'a pas de clapet organique une anémone... ça ne parle donc pas!


Silence...

- « clown toi même...qu'est-ce t'en sait?...t'as déjà été les écouter....non?...ben écrase »



re silence...

le mur pleure des larmes grises, vielle rombière au CO2 dégoulinant sur ses joues ravinées...

- « Et si on allait au bord de mer? »

Pourquoi pas momo, pourquoi pas....

Quelques pets de bus plus tard...

On se balade, tranquilles, sur la corniche direction Sidi Abderrahmane.

Deux paires de fesses, embourgeoisées et ensurvêtementées, sur lesquelles trônent deux têtes de connes endimanchées de leur plus beaux bijoux, nous doublent d'une petite foulée parfumée au saint laurent. Le petit lèche cul qui les accompagne d'un petit trot prince Edward, un caniche féroce, s'arrête pour renifler les savates de Momo en frétillant de la queue

Il lève la patte et t'arroses le Momo d'un petit jet de derrière les fagots...

Momo le reluque anémoné (c'est de le même famille que la méduse...et tant pis pour ceux qui comprennent pas)

Milouda, la plus grosse des deux paires en folie, se retourne (elle ne pouvait s'appeler que comme ça vu sa dégaine d’arriviste matuvu) et minaude le nom de son canin qui bien sûr, comme tout le gratin casablancais, ne parlait que français

Le trio s'éloigne qui en gloussant qui en houahouayant

Momo, tout en se grattant les bijoux de famille, secouant sa jambe pour en chasser l’agression bourgeoise, s’apprêtait à sortir sa plus verdâtre insulte quand il s’arrête médusé (c’est de la même famille que l’anémone…c’est un rattrapage pour ceux qui n’auraient pas compris la précédente tournure…chui gentil)

Un coup de coude dans mes côtes m'invite à suivre la direction indiqué par son menton...

Travelling avant...tout s'éteint autour de nous. Seul un cercle de lumière dorée entoure la créature appuyée contre le muret qui longe la plage. Un son de violons s'élève crescendo dans nos têtes...au rythme de ses cheveux qui ondulent dans le vent.

Adorable créature...

Le sanglot long des violons…..

Momo prend les devants...irrésistible

Elle s'appelle Anne ..une marque suisse déposée...pour quelques jours seulement dans notre sauvage contrée

- « houuu houuu ! »

on tourne la tête vers le son. Une copie conforme trempant ses pieds dans l'eau agite ses bras à notre intention....c'est sa copine...Emone qu'elle s'appelle

....!!!!


- « moi c'est Momo lui c'est Lambdaoui...deux petits poissons clowns qui cherchent à planter pied dans les anémones »


rires...

travelling arrière...

on s'enfonce dans la brume...qui avec son Anne, qui avec son Emone

- « tu vois bien qu'elles parlent les Anne Emone" me fait doucement le momo... »

sacré momo....elles faisaient même houuu houuu les anémones.....

et même que plus tard elles firent aaah aaah...c'est que ça parle très bien une anémone….



© Lambdaoui

17/11/2005

Clair de mur

La nuit est sereine au désert de la rue, lorsque le reflet des étoiles allonge son regard jusqu'à l'eau stagnante au fond de l'égout d'un demi couvercle brisé. Les cancrelats font la fête, danse moribonde sur le trottoir où nos pas résonnent encore de nos faibles espoirs.

Seul le mur, majestueux, où en graffitis se racontent nos histoires, vient briser la pénombre de son carré de pierre délavée...comme nos vies éculées à rien faire.

Sans les voir, je devine les petits hiéroglyphes gravés par Abdel aux paroles d'agounchich...

Ville sale,
Un cancrelat te vide ....


Un cancrelat me vide du pli noir des étoiles...

Et le pleur qui me monte au fond de la gorge, comme un ballon rouge échappé des mains d'un enfant...

Je vous aime mes frères...Momo...Abdel....compagnons d'infortune de Caïn fuyant devant Jéhovah. Je ne vous l'ai jamais dis... je vous aime comme l'été aime la pluie qui le ramène à la vie...

Et le pleur qui déferle dans ma gorge, comme la lune plaintive dans les yeux d'un loup. Je vous aime mes frères, mes ombres sur le mur ...mes prières...

Et le pleur qui s'échappe dans la nuit au feulement d'un chat de gouttière...

Une claque..

Puis une autre...

J'ouvre les yeux...embués


La tête de Momo qui me scrute de son regard merveilleux...deux étoiles du berger dans un même ciel...


Il lève la main pour une troisième claque...je l'attrape au vol, la ramène vers mon visage et l'embrasse

- « Abdel !! Abdeeel !!Je crois qu’il a pété les plombs » s’effare le Momo

- fais pas chier Momo...tu vois pas qu'il rêve!!!


C'est vrai qu'ils passaient la nuit chez moi Momo et Abdel...

Abdel lâche une caisse puante et se retourne en marmonnant je n'sais plus quoi sur sa banquette

Le ressac de la vague de tendresse me ramène doucement dans les limbes du sommeil


Ville sale
Un cancrelat te vide...


Je sens un moment la présence de Momo à mon chevet...il approche son oreille de ma bouche pour s'assurer que je respire...le con...j'ai envie de lui faire "bouh" mais le sommeil m'emporte...

Momo se glisse dans sa banquette en me traitant de connard

De vrais poètes mes potes...de vrais poètes...

Sur le mur, dans le noir au bout de la rue, chantait agounchich...

Ville ordinaire, un cancrelat te vide,
grand chien sans tique !
automnal et malsain !
il te vide du songe des morts
quand la Lune virevolte, quand la semelle alarme
le pli noir des étoiles.



©Lambdaoui

16/11/2005

Le mur du con

Accroupi, le dos au mur et la tête levée vers le ciel, j'expérimentais la qualité des ray-ban's empruntés (à son insu) à ma frangine. L'intense du bleu s'accentuait à travers le filtre des lunettes, faisant encore plus belle cette douce journée d’automne à laquelle rendaient hommage une nuée d’oiseaux par un merveilleux ballet entamé dans le ciel.

Le mur contre mon dos, sentant ma présence, m’empruntai un peu de chaleur arrachée au soleil par sa blancheur maculée par les graffitis de nos aphorismes péremptoires. Momo, assis à mes côtés s’amusait à faire des ronds de fumée avec sa clope…on aurait dit une excroissance naturelle du mur…une gargouille…

- t’as l’air d’une tarlouze espagnole avec ces lunettes qu’il me fait

silence haineux de ma part

Je ne sais pas quelle idée vous vous faites exactement d’un mur, mais moi personnellement je trouve qu’il n’y pas plus sage qu’un mur. Je sais ! vous allez me dire : « un mur ?...mais c’est tout con un mur ! il n’y a pas plus bête qu’un mur. Un mur ça ne parle pas, ça ne réfléchit pas, ça ne bouge surtout pas…ça ne fait rien du tout un mur !!

- awahh !...qu’y sont cons

- momo la ramène pas et laisse les s'exprimer.

vous disiez donc que c'était le symbole de l'inerte, du statique absolu, de la non-vie...

- ce que tu peux être con toi aussi des fois...gallek la non-vie! awah! je me demande où tu vas chercher tout ça...

- momoooo !!!

- bordel ! mais y font chier…et toi avec

Un mur, je continue donc, c’est pas grossier comme momo…

- nariiii !...là mon gars tu te fourres le doigt dans le mou…et jusqu’à l’os. Lis un peu ce qu’il y a d’écrit sur le notre

- où ça ??

- laaaà…juste en dessous du gros champignon d’abdel !

il se marre en plus le con

je cherche

je trouve…

LA CHATTE A NAWAL A MORDU LE CHIEN CHAUD A ABDEL

Je silence un moment

- alors ? c’est pas aussi grossier que moi un mur ??

un coup de pied dans le postérieur décharné de momo plus tard…

momo, renfrogné, à repris ses ronds de fumée

je disais donc qu’un mur ça pouvait être grossier (seuls les cons ne changent pas d’avis)

momo se marre l’air suffisant

et vous donc qui affirmiez qu’un mur c’était « soumoun boukmoun 3oumyoun » expliquez moi un peu pourquoi nos cousins, là bas à l’autre bout de la méditerranée, au pays de la terre promise, ils se cognent la tête contre un sacré mur en se lamentant ! Je me rappelle aussi de mon oncle kacem qui y allait avec ses « chuuuut…parlez doucement » des que ça parlait politique à la maison « les murs ont des oreilles » n’arrêtait-il pas de nous répéter. Pourtant il n’était pas con l’oncle kacem...nos cousins non plus. C’est vous dire que les murs écoutent toutes nos conneries sans broncher…sans piper mot, et pourtant ils nous entendent !! c’est pas de la sagesse ça ??

- lambdaoui ! parle leur de ces deux cons qui se sont pris un mur dans la tronche!

- oui momo, un mur c’est parfois irascible ! et quand deux tarés en voiture, avec plus d’alcool dans le sang que de plasma, s’amusent à emmerder le monde, eh bien il se les gaufre le mur, juste pour nous rendre service.

- Gallek un mur ça ne parle pas !! pourtant le son à bien un mur…hein ? alors !!!...

- Ouais momo…même qu’il nous raconte plein d’histoire un mur. T’aurais connu toutankhamon toi s’il n’y avait pas les murs ? hein ?

- Toutan…qui ??? c’est quoi ça encore ??

- Laisse tomber momo…des fois je me demande si tu t’es pas gaufré toi aussi un mur quand t’étais petit.

Il se fend la poire le momo

- je ne sais pas qui de toi, de moi ou du mur est le plus con…mais ceux qui sont encore plantés là à t’écouter radoter doivent en tenir une sacrée couche…amène toi lambdaoui…je paye le noss noss et toi les marquises...

le mur nous regarde partir l’air triste car il ne peut pas nous suivre, avec dans un petit coin à lui ces petits mots gravés en tous petits carractères…

je suis frère du temps
j’ai vaincu les hommes
j’ai vaincu les ans…

c’est très sage un mur….

© lambdaoui

15/11/2005

Noss noss blues

Il y a des jours où la vie vous pèse de tout son poids de déchéance urbaine. Le vrombissement des bus qui vous atomise le dernier grain de bon sens d'un jet pétant de fumée noirâtre faisant d'une journée de printemps un conglomérat du pire scénario envisageable d'un changement climatique majeur.

Les trous noirs dans l'âme aussi béants que ceux de la couche d'ozone vous exposent doublement à l'effet d'une tempête solaire sur laquelle se reflète le premier vent du typhon en train de naître dans le plus noir de vos angoisses profondes.

Une envie assassine en train de germer sur cet humus fertile vous fait cracher l'injure sur tout ce qui bouge...

Moui Aïcha qui passe d'un pas rapide me jette un regard mauvais marmonnant je ne sais quel invective qualificative de tout ce qui s'apparente au négatif dans ma personne

- Salope!

- Salgout ! qu'elle me répond la mégère

Je me laisse aller un moment contre le mur, tel un lézard...y a pas de lézard me dis-je....y a pas de lézard....

- Eh ducon t'as la trique ma parole!

Momo que je n'avais pas vu venir reluquait la protubérance qui prenait forme dans mon pantalon. Momo avait cette innocence de la remarque crue, sans artifices, qui vous balayait tout assaut de noir vêtu d'un coup de verbe propre à lui, telle une peinture blanche.

-viens ! je te paye un noss noss qu'il me dit tout en tapotant, un sourire en coin, sa poche de chemise sur son cœur en or à travers laquelle, en filigrane, se dessinait un paquet rouge et blanc

-ou sakka en plus!

Le mur me lâcha à contre cœur et s'assombrit de l'ombre d'un nuage vagabond ravalant du coup toute ma rancœur. On s'éloigna à petits pas...la vie était belle après tout...


© Lambdaoui

14/11/2005

En passant par la Lorraine...

En passant par la lorraine (le café du coin) avec mes sabots, j'ai rencontré non pas comme vous sembliez vous y attendre, trois capitaines, mais mon ami Abdel accoudé au zinc, le regard morne, en train de parcourir la page "marché de l'emploi" de notre journal le plus national devant le cadavre d'un noss noss qui n'a de la particularité du sens étymologique que le nom, car ni le lait entrant dans la composition de ce breuvage, ni le café, alter ego laitier dans la constitution de la boisson finale, ne semblaient répondre aux caractéristiques primaires des supposés constituants.

Abdel il est chômeur de son métier. Pas de ces chômeurs non qualifiés qu'on appelle tout bêtement chômeur juste parce qu'ils n'ont pas d'emploi, non! Abdel est un vrai chômeur, bardé de diplômes et de certificats certifiant sa très haute aptitude dans cette fonction dont il s'acquittait avec brio et honneur. S'il y avait une hiérarchie dans cette fonction que le ministère de tutelle devrait réglementer vu la virulence de son développement, eh bien Abdel en serait le PDG.

- alors! bientôt une heureuse issue dans ta quête du graal?

Tu rêves a khouya!! ne sais tu pas que maintenant chez nous la seule voie d'acces à une quelconque fonction dans notre pays se fait via le droit d'ainesse??( à ne pas confondre avec le droit d'ânesse, responsable de notre croissance démographique anarchique) pour devenir ministre il faut avoir un papa ministre. Pour devenir wali il faut avoir un papa wali ...(la preuve les walous ont tous des papas walous). Pour devenir directeur il faut avoir un papa directeur. Pour devenir chef de parti il faut avoir un papa chef de parti. Pour devenir colonel il faut avoir un papa colonel ou à défaut, capitaine dont la femme s'encanaille avec le genéral. Pour devenir journaliste il faut avoir un papa journaliste...o zid ou zid.
koulchi ka yeteouret aandna...htsa lhazqa !



© Lambdaoui ...walou de père en fils

13/11/2005

Rass edderb...

Sur le mur où ma savate, au bout de ma jambe repliée, marque de sa semelle striée mon oisiveté nauséabonde, s'en viennent s'appuyer abdel et momo, aide inespérée dans cette noble tâche d'empêcher le mur délabré du bout de la rue de s'écrouler par un dimanche automnal où ces saletés de pigeons prenaient un malin plaisir, en même temps que la vie, à nous chier dessus.

Le mur nous connaît bien. des qu'on s'y appuie, il se laisse aller de tout son poids à peser sur nos sens pas très éveillés, et chaque brique, chaque crevasse, chaque écaillure trouve sa place dans nos "moi" déglingués insufflant du coup un regain de confiance en nos petites personnes devant lesquelles les habitants du quartier défilaient sans les voir.

Momo enfonce ses mains dans les poches et s'étire comme un ver de terre en baillant à se décrocher la mâchoire

-"waaaaaaaaah......t'as pas une clope??"

devant mon mutisme il se rabat sur abdel qui l'envoie chier sa mère en lui rappelant dans la foulée que c'était à lui de nous ravitailler aujourd'hui.

- j'ai pas un rond...

- tu te démerdes...va voir bunny, il te fera crédit!

en maugréant il s'éloigne faisant claquer ses tongues en signe de mauvaise humeur

abdel se marre...

je silence...

le grand moustachu du 42 passe. On fait le mur...on est le mur. Il s'éloigne sans nous voir. On expire... On respire

- t'es vraiment con abdel! Chai pas ce qui t'as pris d'aller foutre une main au cul à sa fille !!

- t'as vu l'engin que c'est? répond l'abdel. J'ai pas pu m'empêcher. elle arrêtait pas de m'allumer la salope. T'as vu comment elle s'est mise à glousser? Hein t'as vu?...ouais bon! j'avais pas vu son vieux qui se ramenait derrière...il a la main lourde l'enfoiré!

momo revient une clope au bec et nous tend les notres en s'incrustant dans le mur.

On fume...en silence...la journée s'annonce bonne....


© Lambdaoui

Template Design | Elque 2007